Pourquoi tant de mères s’oublient… et comment s’en libérer ?
- aureliebadalin
- 29 mai
- 3 min de lecture

La "bonne mère" : un modèle basé sur le sacrifice
Depuis toujours, dans beaucoup de cultures, on valorise l’image d’une mère dévouée, prête à tout pour ses enfants. Une mère qui donne sans compter, qui s’oublie pour le bien-être des autres, et qui trouve dans cette façon de faire une forme de fierté.
Ce modèle, encore très présent aujourd’hui, est transmis à travers les générations, renforcé par les médias, les discours familiaux, les injonctions sociales... Finalement, en y regardant bien, on ne le remet que rarement en question.
Et pourtant, derrière cette image idéalisée se cache une réalité souvent difficile. À force de se taire, de faire passer tout le monde avant elle, de ne pas écouter ses propres besoins, la mère s’épuise. Son sommeil est coupé, ses émotions mises de côté, son corps mis à contribution sans pause. Cette disponibilité totale, qu’on prend pour une preuve d’amour, finit par devenir une source de solitude, d’irritabilité, de fatigue profonde.
Le burn-out maternel : quand aimer devient trop lourd à porter
Ce que beaucoup de mères vivent au quotidien, c’est une forme d’usure mentale et émotionnelle qu’on appelle aujourd’hui le burn-out parental. Les recherches d’Isabelle Roskam et Moïra Mikolajczak (Université de Louvain) montrent à quel point ce burn-out touche des milliers de familles, en silence.
Une mère qui n’a plus une minute pour elle, qui culpabilise à l’idée de poser des limites, qui n’ose pas demander de l’aide… finit par s’effondrer. Tristesse, fatigue constante, sentiment de vide, irritabilité, sensation de ne plus reconnaître ses enfants… Tout cela n’est pas un manque d’amour. C’est un manque de ressources. Une alarme que le corps et le cœur tirent quand la charge devient trop lourde.
Et pourtant, on continue de croire qu’une « bonne mère » doit tenir, coûte que coûte, quitte à se perdre. Il est temps de dire stop à ce modèle.
Ce qu’on hérite sans s’en rendre compte
Quand je discute avec des femmes que j’accompagne, j’entends souvent : « Ma mère s’est sacrifiée pour nous ». Et derrière cette phrase pleine de gratitude, il y a parfois une autre émotion : un malaise, une gêne, une sensation d’avoir grandi avec un modèle étouffant.
Car ces mères toujours présentes, jamais fatiguées en apparence, étaient elles-mêmes coincées dans un système qui ne leur permettait pas d’exister pour elles-mêmes. Le message transmis, souvent sans en avoir conscience, c’est celui-ci : une femme devient mère en s’effaçant.
Mais aujourd’hui, on peut questionner cela. Non pas pour critiquer nos mères, mais pour leur rendre hommage autrement : en faisant différemment, en ouvrant d’autres chemins. Un modèle qui a été utile à une époque ne l’est plus forcément aujourd’hui. Il est temps de sortir de l’opposition entre égoïsme et sacrifice, et d’inventer une maternité plus libre, plus humaine, plus vivante.
Prendre soin de soi, c’est aussi prendre soin de ses enfants
Se respecter, écouter ses besoins, poser des limites… ce n’est pas tourner le dos à son rôle de maman. C’est le renforcer. Une mère qui prend soin d’elle transmet à ses enfants un message essentiel : tu peux être attentif aux autres sans t’oublier toi-même.
Et c’est aussi un geste fort, presque politique : affirmer que la maternité ne doit pas rimer avec épuisement. Qu’on peut être une bonne mère et une femme à part entière. Qu’on a le droit d’être fatiguée, de demander de l’aide, de ne pas tout faire parfaitement.
En osant dire non à l’injonction au sacrifice, en choisissant une maternité plus alignée, on ne fait pas que se protéger : on change le regard que la société porte sur les mères. Et on aide les générations futures à faire de même.
Voici mes conseils si vous voulez approfondir ce sujet :
Isabelle Roskam et Moïra Mikolajczak, Le Burn-out Parental. Elle ont un site génial burnoutparental.com que je vous conseille vivement !
Aurélie Athan (Columbia University), recherches sur la matrescence
Winnicott D.W., La mère suffisamment bonne
Élise Thiébaut et Camille Froidevaux-Metterie, analyses sur la charge mentale et le corps maternel
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